Un accord mondial sur les pandémies adopté sans l’appui des États-Unis

À Genève, les États membres de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) ont franchi une étape significative en adoptant un accord international destiné à renforcer la prévention et la gestion des pandémies à venir. Ce texte, fruit de trois années de négociations, marque un tournant pour la coopération sanitaire mondiale, dans un contexte où les lacunes observées lors de la crise de la COVID-19 restent encore vives dans les mémoires.

L’adoption du traité, qui a suscité des applaudissements lors de l’Assemblée mondiale de la santé, reflète la volonté de nombreux pays de ne pas répéter les erreurs du passé. Le directeur général de l’OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus, a qualifié ce moment de « victoire pour la santé publique, la science et le multilatéralisme », insistant sur l’importance de renforcer la résilience mondiale face aux menaces sanitaires.

L’un des piliers de cet accord prévoit un accès équitable aux ressources médicales en cas de nouvelle pandémie. Les fabricants de vaccins, médicaments et tests diagnostiques s’engagent à allouer 20 % de leur production à l’OMS, dans l’objectif de soutenir les pays les plus vulnérables. Cette mesure vise à corriger les inégalités flagrantes observées pendant la pandémie de COVID-19, où les pays à faible revenu ont souvent été relégués au second plan dans l’accès aux traitements et aux vaccins.

Toutefois, ce progrès est tempéré par une absence notable : les États-Unis. En raison d’un retrait entamé sous l’administration Trump, les représentants américains n’ont pas participé à la phase finale des discussions et ne sont donc pas liés par les engagements du traité. Ce désengagement soulève des préoccupations quant à l’efficacité de l’accord, étant donné que les États-Unis demeurent l’un des plus importants contributeurs au financement de l’OMS et ont joué un rôle majeur dans le développement de solutions médicales contre la COVID-19.

L’approbation de ce pacte n’a pas été totalement consensuelle. Bien que 124 pays aient voté en sa faveur sans opposition formelle, onze pays, dont la Pologne, Israël, l’Iran, l’Italie, la Russie, la Slovaquie et d’autres, se sont abstenus. La Slovaquie a même exprimé des réserves de dernière minute, invoquant des inquiétudes liées aux vaccins, ce qui a presque entraîné une impasse diplomatique.

Du côté des experts, les avis sont partagés. Certains, comme Michelle Childs de l’initiative Drugs for Neglected Diseases, saluent les avancées du texte, notamment les dispositions sur la recherche et le développement, qui pourraient favoriser une approche plus équitable en matière de santé mondiale. D’autres, en revanche, se montrent plus critiques. Gian Luca Burci, conseiller au Global Health Centre de Genève, considère que le traité, en l’état, manque de mécanismes d’application robustes, et risque de rester symbolique sans engagements concrets.

En l’absence de sanctions prévues en cas de non-respect des obligations du traité, plusieurs observateurs redoutent que son efficacité soit compromise. De plus, l’entrée en vigueur de l’accord dépend encore de l’adoption d’un protocole additionnel portant sur le partage des données génétiques liées aux agents pathogènes. Les discussions sur cet aspect crucial doivent commencer en juillet, et son adoption pourrait prendre jusqu’à deux ans, selon certaines sources diplomatiques.

En somme, si cet accord représente une avancée pour la coopération internationale en matière de santé, il devra encore surmonter plusieurs obstacles avant de devenir un véritable levier de transformation dans la lutte contre les futures pandémies.